Démythifions, démythifions ! (2)
Le mythe de la mobilité des os du crâne
Ce billet fait suite à la récente parution de Mythologies ostéopathiques, publié aux Éditions l’Harmattan, livre constitué d’écrits de plusieurs auteurs rassemblés sous la direction de Pierre-Luc L’Hermite. Le chapitre 3 du livre a été écrit par Marco Gabutti et traite du mythe de la mobilité des os du crâne. Le titre déjà, annonce clairement la couleur. Le mouvement crânien serait un mythe.
Marco évoque le lien existant entre le modèle ostéopathique crânien développé par Sutherland et un modèle similaire développé par le scientifique et mystique Emmanuel Swedenborg à la fin du XVIIIe siècle. Il s’appuie en cela sur les travaux de deux ostéopathes américains, David B. Fuller et Theodore Jordan. J’ai traduit l’article de Th. Jordan Influence de Swedenborg sur le modèle du mécanisme respiratoire primaire de l’ostéopathie crânienne en 2009 pour le Site de l’Ostéopathie (qui n’existe plus aujourd’hui), mais que l’on peut trouver sur le site Osteo4Pattes2 et j’ai traduit le livre de David Fuller Osteopathy and Swedenborg, The Influence of Emmanuel Swedenborg on the Genesis and Development of Osteopathy, Specifically on Andrew Taylor Still and William Garner Sutherland (Ostéopathie et Swedenborg, de l'influence d’Emmanuel Swedenborg sur la genèse et le développement de l’ostéopathie, particulièrement sur Andrew Taylor Still et William Garner Sutherland), un livre de quelque 600 pages qui ne sera probablement jamais publié en français, faute d’un public et par conséquent, d’un éditeur intéressé. Tout au long de son ouvrage, David Fuller insiste sur l’influence qu’a eu Swedenborg sur la vie sociale, philosophique et spirituelle de la société américaine du XIXème siècle. Il insiste également sur l’influence qu’a pu avoir Swendenborg sur la création et le développement du concept ostéopathique par Still ainsi que celle du concept crânien de Sutherland. Ces liens étaient déjà signalés par Carol Trowbridge dans son ouvrage Naissance de l’ostéopathie.
Il est à peu près certain que Sutherland s’est effectivement largement inspiré des écrits de Swedenborg sur le cerveau. Il convient de souligner qu’ils ont été réalisés par Swedenborg dans la première période de sa vie dite période scientifique.3 Et il s’agit bien d’un travail scientifique tel qu’on pouvait le mener à l’époque, s’appuyant sur de nombreuses dissections. Le modèle qu’il en a tiré n’est donc pas sans fondement solide. Cela étant, les scientifiques de l’époque n’étaient pas réticents à parler philosophie et spiritualité. La science ne se confinait pas alors au seul domaine matériel.
Il est vrai que Sutherland ne fait que très peu allusion à Swedenborg et aux emprunts probables à ce dernier. Marco se permet même de le taxer de plagiat ! Et qui sommes-nous donc pour nous permettre un tel jugement associé à une condamnation alors nous ne disposons d’aucun argument explicatif provenant de Sutherland lui-même ?
Pour quelles raisons Sutherland ne parle pas de Swedenborg, dont il s’est manifestement inspiré ? Nous ne le saurons en fait jamais parce que toutes les personnes qui l’ont côtoyé de près sont aujourd’hui décédées et ne pourront pas nous transmettre cette information (si même elles l’ont connue).
Cela étant, l’habitude de ne pas citer ses sources semble assez courante chez les ostéopathes, à commencer par Still qui n’hésite pas à écrire dans La Philosophie et les principes mécaniques de l’ostéopathie :
« Je ne cite aucun auteur, si ce n’est Dieu et l’expérience. Les ouvrages compilés par les auteurs médicaux ne nous sont quasiment d’aucune utilité et il serait vraiment insensé d’y chercher avis et instructions à propos d’une science dont ils ne connaissent rien. Ils ne sont pas capables de nous fournir une explication intelligente de leurs théories composites et il ne leur a jamais été demandé de nous conseiller. […] Un étudiant en philosophie réussit d’autant mieux qu’il recourt aux méthodes de raisonnement les plus simples (Still, 2009, 31-32)
Dans cette citation, il ne parle que des médecins (rappelons que la médecine de l’époque dans le Middlewest américain était particulièrement indigente) mais on sait que pour développer le modèle ostéopathique, il s’est largement inspiré de nombreux auteurs sans prendre la peine de les citer. Dans leurs biographies de Still, Carol Trowbridge (Naissance de l’ostéopathie) et John Lewis (De l’os sec à l’homme vivant) insistent sur l’influence qu’ont certainement eu sur Still et sur la formulation des éléments essentiels de l’ostéopathie Swedenborg (sans doute la tripartition de l’homme – body, mind, spirit), mais également Herbert Spencer, contemporain de Darwin et propagateur du concept évolutionniste sur le plan philosophique.
« Au sein du corps humain vivant étaient à l’œuvre de mystérieuses lois inconnues de la science permettant à des trillions d’unités vitales de coopérer en parfaite harmonie ; lois qui coordonnent la croissance, réparent et guérissent ; lois qui renforcent l’incompréhensible association du corps, de l’esprit [mind] et de l’esprit [spirit]. Pour répondre aux besoins de ces lois mystérieuses, la médecine avait besoin d’une philosophie plus appropriée. Still trouva les bases de l’une d’elles dans les Premiers principes d’Herbert Spencer (1862), volume introductif de sa Philosophie synthétique. Le livre devint ‘l’un des livres les plus précieux de Still’. » (Lewis, 2016, 83.)
Qui a eu la curiosité de lire Premiers Principes4, l’ouvrage qui débute la publication de tout le corpus de Spencer et Principes de biologie ? On y trouve nombre d’affirmations qui ressemblent étrangement aux concepts de base de l’ostéopathie proposés par Still. Pourtant Still n’en parle jamais. Je renvoie le lecteur intéressé par cette question à l’excellent mémoire de notre consœur québécoise Martine Rainville, que l’on peut trouver sur le site de l’ATO.5
Revenons à Sutherland, au concept crânien et sur l’accusation de plagiat formulée par Marco Gabutti. Sur le fait de ne pas citer ses sources, j’ai récemment trouvé une argumentation développée par Rachel Brooks qui a beaucoup travaillé avec Rollin Becker. C’est elle qui a rassemblé les textes de ses conférences dans deux livres La Vie en mouvement et L’immobilité de la vie. Dans un très récent ouvrage Three Great Teachers of Osteopathy, évoquant l’expérience vécue auprès de Rollin Becker, elle écrit ceci :
« Le Dr Becker croyait fermement que les étudiants avaient le droit (et peut-être la responsabilité) de 's’appuyer sur les épaules' de leur professeur. Il pensait que les étudiants pouvaient acquérir les connaissances et les compétences qu’ils pouvaient auprès de leurs enseignants, puis développer leur propre compréhension, que l’on espérait plus grande. En lien avec cette idée, il croyait que ce que vous aviez reçu de vos mentors devenait vôtre. Si vous étudiez ses conférences et ses écrits, vous verrez qu’il nomme rarement la source des informations et des idées qu’il présente. Rollin avait certainement le plus grand respect et la plus grande gratitude pour ce qu’il avait reçu de la lignée des docteurs Still et Sutherland, mais il pensait que la réalité était qu’il avait absorbé et digéré les connaissances au mieux de ses capacités, et que tout ce qu’il pouvait faire était de transmettre sa propre compréhension cumulée. » (Brooks, 2023, 66)
On peut supposer que Sutherland défendait une position similaire. On peut aussi supposer qu’il n’a pas désiré évoquer Swedenborg à cause de l’aspect spiritualiste pour lequel il était essentiellement connu à l’époque et qui « cadrait » mal avec les réticences rencontrées face aux praticiens se voulant « scientifiques ».
De toute manière, nous ne saurons jamais de quoi il retourne exactement et avec le recul, cela ne me semble plus essentiel aujourd’hui.
Le concept crânien, un modèle
Doit-on rappeler ce qu’est un modèle ? C’est une représentation simplifiée d’un processus, d’un système. Le scientifique utilise couramment la modélisation, c’est-à-dire l’abstraction du réel, élaborant des modèles pour tenter de résoudre des problèmes ou de mieux comprendre des phénomènes particuliers qu’il observe ou expérimente. Le modèle est alors une structure théorique très réfléchie, rassemblant un nombre limité d’éléments sélectionnés, susceptibles de varier. C’est une structure visant à faciliter la description, l’étude, la compréhension et éventuellement la prévision des phénomènes qui se produisent ou peuvent se produire dans un champ d’observation défini avec un degré de rigueur élevé et dans des conditions d’observation généralement très strictes et précisées dès le départ.
Alfred Korzybski, fondateur de la sémantique générale, dit que notre première activité en tant qu’individus vivants, c’est de percevoir et que viennent ensuite nos tentatives pour décrire et comprendre ce que nous avons perçu. Ainsi, créons-nous des modèles qui sont des abstractions par rapport à ce qui a été expérimenté. Relativement à ce phénomène, il propose l’analogie de la carte et du territoire : incapables d’envisager un territoire dans toute sa complexité, nous utilisons des représentations, des modèles de ce territoire que nous appelons cartes. Malheureusement, nous oublions bien souvent « qu’une carte n’est pas le territoire qu’elle représente. » (Korzybski 1951, 17). Elle nous donne seulement une représentation partielle de celui-ci à l’aide de symboles, de signes conventionnels et ne représente au mieux qu’une partie de ce territoire.
La caractéristique essentielle d’un modèle est d’être opératoire, fonctionnel. Sa validation essentielle se trouve donc dans le résultat obtenu par son utilisation, conforme ou non à ce qu’on attend de lui.
« On peut dire que l’homme est un incessant constructeur de modèles. Dans la plupart des situations où il peut se trouver, il ne saurait s’en passer pour comprendre et agir. Même les systèmes magiques les plus éloignés de nos modes de pensée font usage de modèles qui nous deviennent parfaitement cohérents dès que nous avons pu saisir la démarche logique sur laquelle ils se fondent, ou découvrir et comprendre les mythes qui leur servent de support. » (Bulla-de-Villaret 1992, 112).
Évaluation d’un modèle
Un certain nombre de critères logiques peuvent nous permettre d’évaluer la qualité d’un modèle. Citons-en quelques-uns.
La fiabilité dépend évidemment des objectifs ayant présidé à la création du modèle qui sera considéré comme fiable dans la mesure où sa mise en œuvre permet d’atteindre les résultats escomptés lors de sa création.
La prédiction est également un élément important. Elle représente souvent une des raisons essentielles ayant présidé à la conception du modèle. Un modèle est donc d’autant plus intéressant qu’il permet de prévoir un enchaînement de causes et de conséquences.
La simplicité constitue un critère important pour évaluer un modèle, parce qu’il est chargé de représenter tout ou partie d’une situation trop complexe pour être envisagée ou étudiée dans son ensemble. La simplicité est également garante de la facilité avec laquelle on pourra le mettre en œuvre.
La maniabilité est indispensable. Trop de lourdeur fige les choses et décourage de modifier quoi que ce soit pour étudier les résultats.
Le modèle apporte-t-il une meilleure compréhension des phénomènes qu’il est chargé d’étudier ? Une qualité majeure rapportée à un modèle siège dans sa capacité à inclure le plus d’éléments possibles au sein d’une compréhension.
Un modèle doit enfin être évolutif et pouvoir être modifié en fonction des difficultés apparaissant lors de sa mise en œuvre, des trouvailles qu’il génère ou des changements intervenant dans la situation qu’il permet d’étudier.
Le modèle de Swedenborg/Sutherland doit-il être réévalué ?
Nous pouvons bien entendu appliquer cela à la modélisation du concept crânien de Swedenborg/Sutherland. Même si, comme tout modèle, il présente des approximations, peut-être/sans doute des erreurs, ce modèle « impossible » existe et est utilisé depuis plus de cent ans. Au cours de cette période, il a aidé, parfois de manière très importante, des millions de gens. Nous avons là un fait !
S’il était vraiment caduc, comment se fait-il qu’au cours de ces années tant de gens y aient eu recours et trouvé, grâce à lui une solution à leurs difficultés ? Peut-on imaginer que tant de gens recourent à des pratiques fondées sur un modèle qui ne fonctionnerait pas ? À ce propos, me vient cette citation d’Herbert Spencer tirée du début de ses Premiers Principes :
« Il nous arrive trop souvent d’oublier non seulement qu’il y a une âme de bonté dans les choses mauvaises, mais aussi qu’il y a une âme de vérité dans les choses fausses. S’il y a des gens qui admettent d’une manière abstraite qu’une fausseté contient probablement un noyau de vérité, bien peu y songent quand ils rendent un jugement sur les opinions d’autrui. On rejette avec indignation et mépris une croyance qui heurte grossièrement la réalité ; et dans le feu de la lutte, personne ne se demande ce qui la recommandait aux esprits. Il faut pourtant qu’il y ait eu en elle quelque chose qui l’imposât. Il y a lieu de croire qu’elle s’accorde avec certaines parties de l’expérience des hommes par une correspondance imparfaite et vague peut-être, mais pourtant réelle. » (Spencer, 1885, 2).
Par rapport au concept crânien, il me semble que la véritable attitude scientifique n’est pas de prouver que le modèle est faux, au motif qu’on ne le comprend pas, qu’il ne peut être démontré par la science. Une telle attitude dénote une incroyable arrogance ! Comme si la science pouvait aujourd’hui tout démontrer !
Cela conduit certains à ne pas vouloir l’utiliser (et même pour certains à le prohiber) par ce qu’il n’est pas démontré ou compatible avec ce que connaît la science. Le problème, c’est que la vie même et l’homme vivant ne cessent de défier la science (Dieu merci !😉) en tout cas la science matérialiste. Outre son incroyable arrogance, cette attitude ne peut qu’interdire tout progrès et toute expérimentation de ce qui n’est pas « démontré par la science », conduisant à un immobilisme destructeur.
La véritable attitude scientifique consiste à essayer de comprendre en quoi ce modèle fonctionne, ce qui, probablement, l’obligerait à sortir de ses formats réducteurs et à changer de paradigme pour passer d’un paradigme matérialiste à autre chose incluant conscience et esprit.
L’impossible mouvement des os du crâne
Marco Gabutti insiste sur l’impossibilité, selon lui, d’une mobilité crânienne chez l’adulte et donc sur l’impossibilité du concept crânien :
« Il découle des points précédents que si on souhaite recourir à un modèle explicatif basé sur la mobilité des os de la base du crâne, on ne peut raisonnablement le faire que pour les nourrissons et les enfants en bas âge. Au fur et à mesure que la fusion des os du chondrocrâne s’opère au cours de la croissance, la possibilité d’imputer la perception des praticien.n.es à des mouvements des os du crâne devient de moins en moins plausible. » (L’Hermitte, 2024, 69)
Ce qui m’étonne toujours, lorsque je lis les « détracteurs » du concept crânien, c’est leur acharnement à démontrer que tout mouvement crânien est impossible, ce qui, à leurs yeux, rend le modèle invraisemblable, alors, répétons-le, que ce modèle est fonctionnel et donne des résultats satisfaisant nombre de personnes y ayant recours.
Sur la manière dont on considère les structures vivantes, il me semble que le modèle de la tenségrité peut nous permettre d’accepter l’idée d’un crâne plastique et mobile. Les recherches poussées concernant ce modèle sont bien exposées et développées dans le livre de Graham Scarr Biotenségrité (2020). Ces travaux permettent de comprendre que la structure vivante, y compris la structure osseuse est souple, plastique et déformable. On peut ainsi supposer que si Sutherland avait connu le modèle de la tenségrité, il n’aurait pas eu besoin de recourir à l’explication de la fameuse articulation sphéno-basilaire, dont on sait effectivement, qu’elle disparaît chez l’adulte. La plasticité des structures osseuses permet d’accepter l’idée de mouvements de toutes les structures crâniennes consécutives à une expansion/rétraction inhérente. Mais au lieu de recourir à des structures rigides articulées sur des axes (modèle certes fruste, mais pas totalement incorrect) ce concept permet de concevoir la base du crâne comme une fleur qui s’ouvre, l’ensemble du système devant s’adapter, ce qui donne des mouvements assez bien individualisés des structures crâniennes périphériques.
Alors finalement, ça bouge ou ça bouge pas ?
Alors, le modèle de Sutherland est-il valide ou non ? Outre l’évidence de son utilité et de son efficacité, la réponse semble en grande partie consécutive au fait de percevoir ou non les mouvements. Si l’on se cantonne dans une logique de type aristotélicien (vrai ou faux), on peut sans doute poser les choses de cette manière : soit
1. L’impulsion rythmique crânienne existe et donc le modèle de Sutherland présente une validité.
2. L’impulsion rythmique crânienne n’existe pas et le modèle de Sutherland est invalide.
1. L’impulsion rythmique crânienne existe et le modèle de Sutherland présente donc une validité.
1.1 Il n’a pas encore été prouvé de manière irréfutable.
Il est vrai que l’on n’a pas encore réussi à démontrer de manière claire et précise que les structures crâniennes bougent, que le système est animé de mouvements d’expansion/rétraction se transmettant aux os du crâne et déterminant à leur niveau des mouvements identifiables. Cela ne veut pas dire que de tels mouvements n’existent pas. Cela dit simplement qu’on n’a pas encore réussi à les enregistrer de manière irréfutable.
Il est fort probable que les technologies existant aujourd’hui permettraient d’obtenir ces informations. Mais le problème essentiel est ici le coût que représenterait la mise en place et la réalisation de protocoles permettant cette vérification et la nécessaire volonté de mener une telle étude qui ne semble pas être la préoccupation des personnes gérant ces systèmes.
1.2 Pourquoi certains le perçoivent-ils ?
1.3 Pourquoi certains ne le perçoivent pas ?
Sur les points 1.2 et 1.3, si je parviens à percevoir ces mouvements, cela devient vrai pour moi : je les ai expérimentés et cette expérience me donne une réalité sur la question. Si je ne les perçois pas, ils ne sont pas réels pour moi et la tentation est forte d’affirmer qu’ils n’existent pas. En fait, ils n’existent pas pour moi, mais cela ne signifie pas qu’ils n’existent pas, puisque certains les perçoivent… Dans un cas comme dans l’autre, l’erreur vient du fait de généraliser une expérience personnelle.
Par rapport à cette question, j’ai personnellement pendant longtemps fait partie des douteurs. Comme je ne percevais aucun mouvement dans le système crânien, je doutais de leur existence, mais la certitude affichée par mes enseignants français ou américains me laissait tout de même penser que si je ne les percevais pas, ils existaient néanmoins peut-être. J’étais dans le doute, ni croyant, ni incroyant (plutôt incroyant tout de même…)
Pour que j’arrive à percevoir ce type de mobilité, il m’a fallu modifier ma manière d’entrer en contact avec les structures crâniennes. À la suite de cela, j’ai pu commencer à les percevoir. Ce qui a changé, à l’évidence, ce ne sont pas les structures que je contactais, mais ma manière de les aborder (de là sont nés les paramètres de palpation). D’incroyant, je ne suis devenu croyant. Mais c’est l’expérimentation qui m’a fait changer de bord. Il m’a fallu du même coup accepter d’être en contradiction avec quelques « autorités » qui prétendaient non seulement que le mouvement crânien n’existe pas, mais qu’il est de plus impossible.
Pour cette raison, les propos de Marco Gabutti m’étonnent d’autant plus qu’il a travaillé avec moi plusieurs années (6 ans), au cabinet et comme co-animateur des stages d’approche tissulaire. Il a donc expérimenté ces choses et je ne me souviens pas qu’à ce moment il ait manifesté quelque perturbation à leur propos.
2. L’impulsion rythmique crânienne n’existe pas et le modèle de Sutherland est invalide
2.1 Pourquoi certaines le perçoivent ?
2.2 Pourquoi son utilisation donne des résultats qui bien que non quantifiables sont bien réels ?
Si ce modèle est vraiment faux et que les mouvements crâniens n’existent pas, alors ceux qui le perçoivent et travaillent avec ne sont que des « allumés » et les gens qui y recourent des « gogos extatiques », comme les appelle Jean-Marie Abgrall dans son livre Les charlatans de la santé (Abgrall, 2018).
OK, mais alors, comment expliquer également que travailler avec ce qui est perçu donne des changements qui, même s’ils ne sont pas toujours quantifiables, sont bien réels et apportent de l’aide à des millions de personnes depuis cent ans ?
Il est bien entendu bien plus facile de rejeter, de prétendre, contre toute évidence, que cela n’existe pas, plutôt que d’explorer et de chercher à comprendre et d’émettre des hypothèses, aussi farfelues puissent-elles paraître…
Bibliographie
Abgrall, Jean-Marie. 1998. Les charlatans de la santé. Documents Payot. Paris : Payot & Rivages.
Becker, Rollin E, Rachel E Brooks. 2012. La vie en mouvement. Vannes : Sully.
Becker, Rollin E, Rachel E Brooks. 2013. L’immobilité de la vie. Vannes : Sully.
Brooks, Rachel E. 2023. Three Great Teachers of Osteopathy: Lessons We Learned from Drs. Becker, Fulford, and Wales. Stillness Press, LLC.
Bulla de Villaret, Hélène. 1992. Introduction à la sémantique générale de Korzybski. Paris : Éd. le Courrier du livre.
De Mendoza, Jean-Louis Juan. 1996. Deux hémisphères : un cerveau : un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir. Paris : Flammarion.
Fuller, David B. 2012. Osteopathy and Swedenborg: the influence of Emanuel Swedenborg on the genesis and development of osteopathy, specifically on Andrew Taylor Still and William Garner Sutherland. Bryn Athyn, Pa : Swedenborg Scientific Association Press.
Gevitz, Norman. 2019. The DOs: osteopathic medicine in America. Third edition. Baltimore, Maryland: Johns Hopkins University Press.
Korzybski, Alfred. 1998. Une carte n’est pas le territoire Introduction à la sémantique générale et aux systèmes non-aristotéliciens. Paris : Éditons de l’Éclat.
Lewis, John Robert. 2016. A.T. Still : de l’os sec à l’homme vivant. Traduit par Pierre Tricot. Gwynedd LL41 3YW.
L’Hermite, Pierre-Luc. 2024. Mythologies ostéopathiques. Éthique et pratique médicale. Paris: l’Harmattan.
Prieur, Jean. 1994. Swedenborg : biographie et anthologie. Paris : Lanore.
Scarr, Graham, et Stephen M. Levin. 2020. Biotenségrité : la base structurelle de la vie. 2e édition. Vannes : Sully.
Still, Andrew Taylor. 2001. La philosophie et les principes mécaniques de l’ostéopathie. Paris : Éd. Frison-Roche.
———. 2009. Ostéopathie : Recherche et pratique. Vannes : Sully.
Trowbridge, Carol. 1999. La Naissance de l’ostéopathie. Vannes : Sully.
Truhlar, Robert Edison. 1950. Doctor A. T. Still In The Living: His Concepts And Principles Of Health And Disease. Robert E. Truhlar.
1 Paru sur le blog du site de l’ATO, 10 juillet 2024.
2 https://www.revue.sdo.osteo4pattes.eu/spip.php?article2140
3 Pour connaître la vie et l’œuvre de Swedenborg, il existe un excellent ouvrage en français : Jean Prieur, Swedenborg: biographie et anthologie. Éditions Lanore 1994.
4 Dont on peut télécharger le texte complet sur le site de l’ATO : https://www.approche-tissulaire.fr/images/stories/fichiers_pdf/HS_Principes.pdf
5 https://www.approche-tissulaire.fr/images/stories/fichiers_pdf/mr_still_et_spencer.pdf