La communication tissulaire dans l'expérience ostéopathique
Frédéric LOUIS-BECHADE Montréal, juin 2016 Écrire à Frédéric LOUIS |
Comprendre la communication tissulaire dans l'expérience ostéopathique
Question de recherche
Quelle est la compréhension des ostéopathes du concept de communication tissulaire ?
Résumé
Objectif
Alors que les écrits traitant explicitement du concept de communication tissulaire sont encore rares, il semblait intéressant d’aller directement à la rencontre d’ostéopathes s’inscrivant dans la lignée traditionnelle de l’ostéopathie telle que définie par Andrew T. Still et William G. Sutherland pour partager leur expérience à ce sujet. L’apport de la phénoménologie et de sa vision du rapport de l’homme au monde constitue une piste encourageante pour appréhender la dimension expérientielle du praticien avec l’autre, le patient et son corps vivant, dans un partenariat de soin. Un momentum semble se dessiner au regard des découvertes scientifiques et de la manière d’aborder la relation thérapeutique patient-praticien. Découvrir le vécu d’ostéopathes et analyser leurs témoignages doit permettre de décrire ce concept et de définir sa place dans la pratique ostéopathique.
Matériel et méthodes
Étude qualitative phénoménologique de type descriptive réalisée auprès de dix (10) ostéopathes intéressés sur la base d’entrevues semi-dirigées suivant quatre (4) axes d’exploration du concept de communication tissulaire : définition proposée, expérimentation pratique, voie d’apprentissage et cadre théorique associé. Chaque entrevue a été synthétisée dans un premier temps puis l’ensemble analysé de manière transversale pour faire émerger les thèmes communs à la communication tissulaire, ses composantes, ses enjeux et sa place dans la pratique.
Résultats
La communication tissulaire représente la base du principe de traitement en ostéopathie. Elle nécessite la mise en place d’un lien de confiance entre le patient et le thérapeute pour que puisse s’établir un contact sensible qui permettra d’aller rejoindre la capacité d’autorégulation du patient, l’intelligence du corps, et de dialoguer avec. L’expérimenter requiert des qualités d’être et un savoir-faire à développer pour être en mesure d’offrir un point d’appui à ce mécanisme qui trouvera un nouvel équilibre de santé. L’ostéopathie est une praxis, une thérapie manuelle qui nécessite un apprentissage par le corps pour se constituer un registre de ressentis validés. La voie privilégiée est celle du compagnonnage et de l’exploration personnelle. Le cadre théorique quant à lui, secondaire à l’expérimentation, puise ses origines dans les modèles de la tradition ostéopathique et participe au développement d’une conscience de perception de plus en plus globale du patient qui tient compte de l’être entier au-delà du simple corps physique à traiter.
Conclusion
La communication tissulaire représente un vecteur d’échange privilégié dans la relation de soin. Elle permet de retrouver au plus profond de l’intimité du patient et de son individualité, l’universalité de l’expression de la vie dans ses tissus. Il s’agit d’apprendre à interpréter ce langage d’un corps sensible, celui d’un être vivant et son rapport au monde.
Mots clés : communication, dialogue, écoute, échange, relation, présence, corps, sensible, tissu, tissulaire, mécanisme, phénoménologie, qualitatif
Abstract
Goal
While writings dealing explicitly with the concept of tissue communication are still rare, it seemed interesting to encounter osteopaths in the tradition of osteopathy, as defined by Andrew T. Still and William G. Sutherland, to share their experience. The contribution of phenomenology and its vision of man’s relationship with the world is an encouraging way to capture the experiential dimension of the practitioner with the patient and his living body in a partnership of care. Momentum seems to be emerging in the light of scientific findings and a way to approach the therapeutic patient-practitioner relationship. By assembling lived experiences of osteopaths and analysing their testimony, this concept could be described and its place defined in the osteopathic practice.
Material and Methods
It’s a descriptive phenomenological qualitative study conducted among ten (10) interested osteopaths on the basis of semi-structured interviews following four (4) lines of exploration of the tissue communication concept: proposed definition, practical experimentation, way of learning, and associated theoretical framework. Each interview was synthetized at first and then together transversely analysed to determine the common themes of tissue communication, its components, issues and place in practice.
Results
Tissue communication is the basis of an osteopathic treatment. It requires the establishment of trust between the patient and the therapist so a sensitive touch can be settled to connect with the patient’s self-regulation capacity, the body’s intelligence, and to intereact with it. This experiment necessitates qualities of being and the development of an expertise to be able to offer a fulcrum to the mechanism which will reach a new health balance. Osteopathy is a manual therapy that requires to be embodied. This way, a register of validated feelings can be built up. The recommended learning path goes through companionship and self exploration. The theoretical framework, secondary to experimentation, originates from the osteopathic traditional models. It participates in the development of a consciousness of perception for an always broader inclusive approach of the patient that considers his entire being beyond the mere physical body to be treated.
Conclusion
Communication with tissues is a privileged exchange medium in the relation of care. It allows finding in the depths of the patient privacy and individuality, the universality of life’s expression in its tissues. It is about learning how to interpret the language of a sensitive body belonging to a living being and its relationship to the world.
Keywords: communication, dialogue, listening, sharing, relationship, presence, body, sensitive, tissue, mechanism, phenomenology, qualitative
Table des matières
QUESTION DE RECHERCHE
RÉSUMÉ
ABSTRACT
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
1. PROBLÉMATIQUE
2. ÉTAT DES CONNAISSANCES
2.1. Évolution de l’ostéopathie dans la lignée traditionnelle (Still, Sutherland, Becker)
2.1.1. Histoire, principes et philosophie
2.1.2. Les modèles ostéopathiques dans la lignée traditionnelle
2.2. La communication tissulaire en ostéopathie
2.2.1. Définition de base de la communication tissulaire
2.2.2. Les constituants de la communication tissulaire en ostéopathie
2.2.3. Réflexions contemporaines comme pistes de compréhension de la communication tissulaire
2.2.4. Place de la communication tissulaire et les limites de son étude en ostéopathie
2.3. L’ouverture à la phénoménologie
2.3.1. Les premiers pas de la phénoménologie en ostéopathie (Becker, Comeaux, Ducoux, Roche)
2.3.2. De la phénoménologie à l’ostéopathie
3. JUSTIFICATION ET BUT DE LA RECHERCHE
4. MATÉRIEL ET MÉTHODES
4.1. Type de recherche
4.2. Identification des phénomènes et du concept étudiés
4.3. Stratégie d’échantillonnage
4.3.1. Revue de littérature
4.3.2. Population
4.3.3. Recherche de l’adversité
4.3.4. Pertinence de la stratégie
4.4. Description des outils de collecte de données
4.4.1. Questionnaire
4.4.2. Entrevue semi-directive, enregistrement audio et analyse des données
4.5. Critères de validité de la recherche
4.5.1. Validité interne
4.5.2. Biais et gestion de la subjectivité
4.5.3. Triangulation
4.5.4. Saturation des données
4.5.5. Considérations éthiques
5. RÉSULTATS
5.1. Population et caractéristiques
5.1.1. Taille de la population
5.1.2. Caractéristiques de la population
5.2. Analyse entretien par entretien
5.2.1. Participant E1: « Ha! Communication is communication Let’s talk. »
5.2.2. Participant E2 : « Qui est-il (le tissu)? Où est-il? Comment est-il? »
5.2.3. Participant E3: Perception, échange, niveaux
5.2.4. Participant E4: « La vie », « échange d’informations »
5.2.5. Participant E5: «... Cela évoque plus que les tissus. Cela évoque le corps tout entier au sens large. »
5.2.6. Participant I1: « Début de l’approche ostéopathique ensuite ouverture à autre chose »
5.2.7. Participant I2: « La base du traitement en ostéopathie »
5.2.8. Participant I3: « Un échange, une écoute, une danse, un équilibre, la voie »
5.2.9. Participant I4: « Équilibre et échanges réciproques de Becker cité par Duval »
5.2.10. Participant I5 : « La capacité que nous avons avec notre main et notre sensorium à décoder l’information qui vient des tissus du patient »
5.3. Analyse thématique transversale
5.3.1. Représentation de la communication tissulaire par les participants
5.3.2. Expérimentation de la communication tissulaire par les participants
5.3.3. Apprentissage de la communication tissulaire suivant les participants
5.3.4. Cadre théorique de la communication tissulaire par les participants
6. DISCUSSION ET CONCLUSION
6.1. Résultats et sens à donner au concept de communication tissulaire
6.1.1. La communication tissulaire comme principe de base du traitement dans la tradition ostéopathique et ses modèles
6.1.2. La communication tissulaire comme vecteur d’échange dans la relation thérapeutique et moyen de contacter l’intelligence du corps
6.1.3. La communication tissulaire comme moyen d’exploration de l’autre, entre intimité et distance juste
6.1.4. La communication tissulaire comme espace de partage dans l’apprentissage
6.1.5. La communication tissulaire comme illustration privilégiée de la cognition incarnée et de la subjectivité afférente
6.1.6. La communication tissulaire comme source de ressentis définissant une réalité subtile du corps humain
6.1.7. La communication tissulaire comme aiguillon à la recherche d’explications
6.1.8. La communication tissulaire comme composante d’un langage d’exploration du monde, du corps sensible
6.1.9. La communication tissulaire comme moyen de dépassement et d’expression artistique pour appréhender le mystère de la vie
6.1.10. La communication tissulaire comme moyen d’accès et d’interprétation de l’insondable
6.2. Forces, limites et faiblesses de la recherche
6.2.1. Forces de la recherche
6.2.2. Les limites de la recherche (devis, population, etc.)
6.2.3. Les faiblesses de la recherche (scientificité)
6.2.4. Autocritique du travail et de la démarche
6.3. Transférabilité, retombées potentielles et valeur clinique/pratique des résultats
6.3.1. Transférabilité et retombées
6.3.2. Valeur clinique/pratique des résultats
6.4. Recommandations et suggestions pour de futures recherches
6.4.1. Utiliser l’approche phénoménologique
6.4.2. Se pencher sur les travaux en pédagogie perceptive
6.4.3. D’autres approches à considérer à l’exemple du focusing
6.4.4. L’énaction de Varela, outil quantitatif et qualitatif?
6.4.5. Intérêt des groupes de discussion
6.4.6. Cadre et pistes de recherche à envisager
6.5. Conclusion - « message à retenir »
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXE A. Chapitre de méthodologie du protocole
ANNEXE B. Brève comparaison des modèles biomécanique et biodynamique en ostéopathie dans le champ crânien (source : McPartland & Skinner, 2005)
ANNEXE C. Lettre de publicité et recrutement des ostéopathes
ANNEXE D. Questionnaire de sélection
ANNEXE E. Formulaire de consentement à la recherche
ANNEXE F. Formulaires d’autorisation d’enregistrement audio pour l’entrevue
ANNEXE G. Formulaire d’autorisation de citation et de nomination du participant
ANNEXE H. Squelette de l’entrevue semi-dirigée
ANNEXE I. Journal de bord
ANNEXE J. Les 7 mécanismes du corps humain proposés par M. Phillipe Druelle D.O
ANNEXE K. Synthèse des modèles et de leurs caractéristiques en lien avec le concept de communication tissulaire