Des limites qui se repoussent
Cela a commencé à repousser les limites que j’assignais à l’ostéopathie, sans pour autant me donner d’outils me permettant de mettre en pratique. En revanche, cela rejoignait certains propos tenus par Viola Frymann que j’ai eu la chance de rencontrer très tôt dans mon apprentissage d’ostéopathe :
Dans un texte, Le développement du concept ostéopathique étendu4, évoquant une de ses patientes souffrant de migraines particulièrement intenses, elle écrit :
L’évolution de cette maladie dévoile plusieurs aspects du concept de l’ostéopathie étendue. Il y a d’abord l’aspect structurel provenant d’un traumatisme sévère, puis l’aspect chimique résultant d’une nourriture pauvre, l’aspect émotionnel dû au ressentiment, à la colère refoulée et à l’obstination, l’aspect mental de schéma immuable, il y a aussi la difficulté à laisser la puissance du spirituel guérir et changer sa vie entièrement. Combien d’entre nous veulent être soulagés de leurs maux, mais ne pensent pas à changer leurs précieuses habitudes de vie, leurs sentiments, leurs pensées, oui, et même leur foi.
[…] La vraie cause des manifestations maladives ne peut être perçue physiquement par la conscience que quand les blocages des mouvements sont supprimés. Ceux-ci peuvent être des blocages structurels ou physiques. Quand les mouvements de la structure sont libérés, les causes conscientes et inconscientes reviennent à la surface, pourvu que le praticien puisse offrir une atmosphère propice à une telle purification. Nous avons appris à fournir les conditions structurelles pour que le corps se normalise de lui-même. Nous sommes prêts maintenant à apprendre comment laisser les émotions et le mental se régulariser, quand la lumière fluide commence à couler, dans chaque partie de l’être.
Viola Frymann citait beaucoup Still et Sutherland. Or, bien que cela puisse paraître aujourd’hui paradoxal, nous ne connaissions pas Still et très peu Sutherland. À cette époque (les années 1970-1980), il était très difficile de se procurer leurs ouvrages et ceux qui les possédaient les gardaient jalousement sur les étagères de leurs bibliothèques privées. Pour nous, Still était un personnage d’un autre âge avec lequel nous n’avions pas de lien. Dans The Law of mind, matter and motion, Conférence à la mémoire du Dr Scott, Viola écrit à propos de Still :
Combien parmi vous ont lu son Autobiographie ? Si vous l’avez lue il y a longtemps, reprenez-la comme je l’ai fait, et vous y découvrirez aujourd’hui énormément de choses que vous n’aviez pas remarquées auparavant. Si vous ne l’avez jamais lue, une expérience inspirante vous attend, car à moins d’avoir souffert, exploré et découvert comme le Dr Still, comment pouvez-vous comprendre le concept ostéopathique et concevoir la destinée de la profession ? Considérons un autre aspect de ce grand homme. Attachons-nous à le mieux connaître ; nous pourrons ainsi mieux comprendre l’immensité de son enseignement. « Dès ma plus tendre enfance, j’ai été visité par des visions nocturnes. » « Je suis ce que les gens appellent parfois un ‛inspiré.’ Nous autres, méthodistes, disons ‛intuitif.’ D’autres ont des noms différents pour cela – clairvoyant, clairaudiant. » En 1898, à la question « Qui a découvert l’ostéopathie ? », il a répondu : « Il y a vingt-quatre ans – c’est-à-dire 1874 – le vingt-deuxième jour de juin, à dix heures, j’ai perçu une petite lumière sur l’horizon de la vérité. D’après ce que j’ai compris, elle fut placée dans ma main par le Dieu de la nature. Cette lumière montrait sur sa face l’inscription suivante : ‛ Voilà Ma bibliothèque médicale, Ma chirurgie et Mon obstétrique. Voilà Mon livre, avec toutes les directions, instructions, doses, tailles et quantités devant être utilisées dans chaque cas de maladie et de naissance, au commencement de l’homme ; dans l’enfance, la jeunesse et à l’âge du déclin.’ »
C’était un homme d’une profonde conscience spirituelle. Il ne prêchait pas la religion, mais il connaissait Dieu et le reconnaissait comme source de toute vérité. « Dieu est le père de l’ostéopathie » écrivit-il et « Je n’ai pas honte de l’enfant de sa pensée ». Plus tard, il admonestait ainsi ses étudiants : « Dans ce travail, nos résultats dépendent absolument de la loi divine ». Il dit : « Je ne crains pas que suivre une loi conçue par Dieu m’éloigne de lui. Chaque avancée en ostéopathie nous conduit à une plus grande vénération du Divin Souverain de cet univers.5